lundi 9 août 2010

Comme un oiseau en cage


Chapitre 7

Zolzite tournait en rond tel un lion en cage, dans l’antichambre donnant sur le bureau de la Grande Sénéchale.Il en avait assez d’attendre. Cela faisait deux heures qu’il était là. Ayant toujours mal à son gros orteil après avoir donnait un coup de pied dans une statue représentant la maîtresse des lieux, il s’assit sur le fauteuil recouvert de velours pourpre et posa son pied meurtri sur la table basse en bois précieux située non loin. Il soupira d’exaspération. Il en avait vraiment marre. On ne lui avait même pas apporté de quoi se sustenter. Il y avait peut être une sonnette caché derrière une tenture ou un rideau. Mais il n’avait pas envi de se lever. Ce fauteuil était confortable après tout. Ou alors il pourrait appeler un garde … ou … Il pouvait toujours tenter le coup. Il claqua donc des doigts. Cela marchait dans le temps. Mais rien ne se passa.

Après avoir poussé un juron, il se redressa sur son siège. Bon alors, comment faire ? Il se décida finalement à se lever. Il se dirigea vers la porte par laquelle il était entré, l’ouvrit doucement, voulu sortir mais une lance lui barra la route. Le gardien en livret pourpre qui la tenait, le regardait qu’un air impassible. Ses lèvres semblaient ne pas avoir bougées quand il dit :

« Vous ne pouvez pas sortir Monsieur »

Zolzite le regarda perplexe. Alors comme ça il était retenu prisonnier !? La belle affaire. Il se décida donc à jouer franc jeux.

« Je voulais juste savoir si il était possible d’avoir une tasse de thé et quelques douceur pour rendre l’attente plus … agréable ? demanda t-il.

- Ceci n’est pas dans mes cordes Monsieur, je ne peux pas quitter mon poste, répondit le garde sans laisser transparaître la moindre émotion.

- Bon, eh bien … peut être pouvez vous appeler quelqu’un alors ? Tenta Zolzite.

- Monsieur, ceci n’est pas dans mes attributions.

- Dans ce cas je vais rester là et attendre qu’un serviteur passe.

- Monsieur doit rester dans l’antichambre.

- Oui mais j’ai faim.

- Monsieur doit patienter, vous serez reçue par Madame dans peu de temps.

- Mais enfin, vous m’avez dit la même chose il y a deux heures !!!

- Monsieur patienter vous se …

- Oui-oui ça va j’ai compris !!

Zolzite claqua la porte au nez et à la barbe du garde. C’était énervent de se faire balloter ainsi. On se moquait ouvertement de lui. Il avait entendu les rires sur son passage, les moqueries, les phrases assassines.

Toujours la main sur la poigné, il se tourna vers la fenêtre se trouvant en face de la porte. Et c’est là qu’il La vit.

Elle était de profil, ses longs cheveux dont la couleur oscillé entre le brun et le violet noué en une coiffure sophistiquée, son nez fin et long, ses lèvres pleines et rose, ses longues oreilles, ses grands yeux à la couleur indescriptible, ses longs cils, son visage fin. Elle était magnifique dans cette robe antique couleur lilas. Zolzite se sentais un peu minable à côté d’elle.

La Grande Sénéchale se tourna vers lui, le visage impassible. Décidément, personne ne ressentait d’émotion dans ce palais. D’un geste de la main, elle invita le démon à la suivre dans son bureau. Une fois entré dans la pièce la porte se ferma d’elle-même derrière elle. Elle s’assit sur un fauteuil recouvert de soie couleur vert d’eau, brodé de fleur en fil d’argent. Zolzite s’assit sur un fauteuil similaire en face d’elle. Ils n’étaient séparés que par une table basse sur laquelle avait était posé une théière en argent dont le bec laissé échappé l’arôme d’un thé précieux, deux tasses de porcelaine fines et un plateau garnis de douceurs variés.

La Grande Sénéchale et le démon partageaient la même faiblesse pour le sucré et les thés depuis leur plus tendre enfance. Mais pour le moment ils étaient là, assis l’un en face de l’autre, à se regarder tel des chiens de faïences. Attendant que l’autre parle le premier. En tout cas elle n’avait pas changée. Elle était toujours la même.

« Je vois que tu es toujours aussi inaccessible, commença Zolzite en plaisantant.

Son visage ne se dérida pas pour autant.

- Il le faut bien, si je ne veux pas être dérangé sans arrêt par des personnes inopportunes.

Zolzite tiqua.

- Dois-je comprendre que ma visite ne te plaît pas ?

- J’ai beaucoup de travail.

Le démon fronça brièvement les sourcils. Il s’empara de la théière et versa le thé dans les tasses.

- Mais tu as bien le temps de prendre une tasse de thé non ?

La Grande Sénéchale suivit la théière des yeux jusqu’à ce que son interlocuteur la repose sur le plateau. Elle ne voulait pas que cette rencontre s’éternise. Pour cela elle devait aller dans le sens du démon assis en face d’elle.

- Bien sûr.

Zolzite lui tendit une tasse placée sur une soucoupe rempli du liquide fumant. Elle s’en saisit et attendit qu’il ait la sienne dans ses mains, pour porter la tasse à ses lèvres et boire une gorgée de thé. Elle reposa la tasse sur sa soucoupe et regarda son interlocuteur dans les yeux.

- Alors, que me vaut cette audience ? demanda la jeune femme.

Zolzite posa sa tasse sur la table et pris un macaron à la mangue, qu’il examina avant de le manger.

- Eh bien vois-tu, je viens de revenir dans l’Autre Monde. L’éducation de William étant « terminée » vu qu’il est majeur, commença le démon d’un ton désinvolte.

- Oui, c’est ce que j’ai cru comprendre.

- Je suis donc rentrer chez moi et je suis allé au Bureau pour reprendre mon activité. Mais voilà, l’accueil n’a pas était très … agréable là bas, continua Zolzite.

- Ils ne sont jamais très aimable non plus là bas en général, dit la jeune femme avec un petit sourire.

- Oui-oui bon … et j’ai entendu des bruits de couloirs, rumeurs, ragots, ce que tu veux … et certains de ses « on dit » m’ont fait penser à quelqu’un en particulier. En disant ces mots Zolzite s’était penché vers son interlocutrice par-dessus la table.

- Enfin Zolzite, où vas-tu chercher des histoires pareilles ?

- Ne fais pas l’innocente !!, déclara le jeune homme sur un ton menaçant, tu sais très bien de qui je veux parler !! Et depuis que je suis là, Elle me met des bâtons dans les roues. Je n’ai pas de travail, je suis au chômage. Que veut-Elle ?? Que je retourne chez les Humains ? Ils sont notre gagne pain mais de là à retourner là bas …

Zolzite était en colère. Comment sa propre mère pouvait-elle le rejeter ainsi ? D’accord il n’était pas de ses deux enfants, celui qui avait le mieux réussit. Mais il était son fils. Ils ne s’aimaient pas. Mais il n’avait rien fait pour lui nuire, en tout cas pas directement.

Le démon se leva et commença à faire les cents pas.

- Qu’attends-tu de moi ? demanda la Grande Sénéchale avant de reporter sa tasse de thé à ses lèvres.

- De l’aide, du soutien, un travail, … ma sœur !!!

A ces mots, la jeune femme leva les yeux vers son interlocuteur. Elle semblait choquée par ces paroles. Pourtant, elle aussi avait souffert de l’absence de Zolzite. Elle était devenue plus froide, travailler plus, plus intransigeante, plus cruelle aussi peut être.

- E … Ecoute Zolzite, je sais que nous sommes frère et sœur mais…

- Mais quoi ??? Nous ne sommes pas que frère et sœur, nous sommes jumeaux !!!

A ces mots, la Grande Sénéchale devint blême. Oui, il avait parfaitement raison. Ils étaient nés le même jour, à la même heure. Ils avaient grandis ensemble. Ils étaient la moitié de l’autre. Indissociable. Unis. Mais elle avait une position trop haute dans la société par rapport à son jumeau.

- J’irais Lui parler. Elle ne te gênera plus. Ou moins. Tu sais comment Elle est.

- Merci. Bon je vais y aller. Ma fille a eu son premier jour à l’EDEM aujourd’hui.

- J’espère que ça c’est bien passé, dit la jeune femme avec un sourire.

- Avec une tante comme toi, je crois que ça ira.

Les jumeaux se regardèrent avec des yeux tendres. Leurs complicité leur manquée. Ils avaient hâte de la retrouver.

La Grande Sénéchale se leva et s’approcha de son frère, lui posa une mai sur l’épaule et lui dit :

- Viens avec elle la prochaine fois, nous irons nous promener dans le parc.

Zolzite pris la main de sa sœur dans la sienne et la porta à ses lèvres.

- D’accord. Elle sera contente de te voir. Elle te réclame depuis que nous sommes rentrés.

L’horloge sonna dans un coin du bureau.

- Je dois y aller. Elle m’attend.

- Bien, alors je ne te retiens pas. Et je passerais un mot au Bureau pour qu’il te donne un bon travail.

Zolzite se pencha vers sa sœur, et déposa un baisé sur son front ;

- Merci Zouzou.

Zolzite quitta la pièce non sans jeter un dernier regard à sa jumelle.