jeudi 8 avril 2010

Chapitre 5

Marchant d’un pas rapide à travers le Palais Obscurs, il ne vit pas les regards, tantôt outrés, tantôt admiratifs, des personnes qu’il croisait.
Tout ce qui comptait, à ce moment précis, était qu’il « La » trouve.
Il en avait assez, ça devait finir !
Oui, il avait commis des erreurs.
Oui, il n’était pas celui qui avait le mieux réussit.
Oui, il était quasiment en bas de l’échelle social de l’Autre Monde.
Oui, il ne devait son laissé-passé au Palais Obscurs qu’à la Grande Sénéchale.
Mais !
Ce n’était pas une raison pour se laisser faire.
Il n’était plus un gamin.
Il donna un coup de pied rageur dans une statue qui se trouvait sur son chemin. Celle-ci se brisa sous le choc, répandant un nuage de gravas et de poussières autour de lui. Mais il ne savait pas où chercher. Cela faisait 10 ans qu’il n’était pas venu ici. Il n’avait pas la moindre de idée de l’endroit où « Elle » pourrait se trouver.
Pestant de nouveaux, il se tourna vers deux gardes en livrée, qui pouffaient non loin de lui.
« Hé vous là bas !! Lança-t-il, savez-vous où est la Dame d’honneur ?
Les deux gardes pouffèrent de plus bel. Cet homme, vêtu de manière vulgaire voulait s’entretenir avec l’une des plus puissantes personnalités de l’Autre Monde. Il y avait de quoi rire.
- Voyons le gueux, as-tu au moins pensé à demander une audience avant de te présenter ici ? demanda le plus âgé des gardes qui tentait tant bien que mal de calmer son rire.
Le visage de Zolzite se colora de rouge. Pourtant ce n’était pas la première fois qu’on l’humiliait.
- Je n’en ai pas besoin, imbécile ! Bégaya-t-il.
A ces mots, les deux gardes cessèrent de rire. Ils commencèrent à dégainer leurs épées quand apparut au bout de la galerie qui donnait sur les jardins du Palais Obscur, une jeune fille de 17 ans, vêtue d’un pantalon blanc et d’une tunique rose pâle. Elle avait de long cheveux châtain et des yeux jaunes qui faisaient étrangement penser à ceux d’un aigle.
« Laissez, dit-elle, êtes-vous donc tellement bête que vous n’êtes pas capable de reconnaître mon frère qui rentre enfin de son long exil ? »
Les gardes s’inclinèrent devant la jeune fille et bredouillèrent des excuses. Elle tapa du pied et leur ordonna de partir. Ces derniers, connaissant les colères de la demoiselle, s’empressèrent de les laisser seuls, trop heureux de s’en tirer à si bon compte.
Zolzite, un air ahuri sur le visage, regarda sa jeune sœur se tourner vers lui et lui dire :
« Eh bien, dit-elle d’un air mi amusée mi agacée, tu pourrais me remercier de t’avoir aidé. Je sais que l’on ne se connaît pas vraiment malgré nos liens familiaux mais …
- Merci, mais je n’ai pas besoin de l’aide d’une bâtarde ! Effectivement je ne te connais pas et ne veux pas te connaître. Pour moi tu es comme les autres : un petit toutou qui suit ma mère partout où elle va.
Le visage de Zéline se colora de rouge. Qu’avait-elle donc fait pour qu’il la déteste autant ? Elle n’avait rencontré Zolzite qu’en de rares occasions : son mariage, après la naissance de sa fille, le jour où leur mère l’avait condamné à l’exil jusqu’à ce que sa tâche fût accomplie. C’était même la première fois qu’elle lui parlait.
Blessée, la jeune fille observa plus attentivement son frère, vêtu de botte en cuir, d’un pantalon noir, d’une chemise de la même couleur dont il n’avait boutonné que deux boutons, ses longs cheveux gris emmêlés, les sourcils froncés, il n’avait vraiment pas l’air de bonne humeur. Elle avait été tellement heureuse de savoir qu’il allait rentrer, maintenant il la rejetait. Malgré tout elle voulait l’aider. Sa mère lui avait dit qu’il était une catastrophe ambulante. Si cela était vrai, il fallait qu’elle l’aide pour qu’il évite de se faire remarquer de la mauvaise manière.
« Que cherches-tu ici, demanda la jeune fille.
- Je cherche la Dame d’honneur, répondit Zolzite avec une grimace.
- « Elle » doit être accompagnée de ses habituels lèche-bottes. Je crois qu’« Elle » m’a dit qu’un thé était donné sous le kiosque végétal dans le parc du Palais, lui indiqua-t-elle en se grattant le menton.
Zolzite eut un sourire moqueur :
- Oui, Mère adore être entourée de sa petite cours. Ça ne m’étonne pas qu’elle ne soit pas seule. Et bien c’est l’occasion de montrer à tous qu’elle n’est pas si remarquable que cela.
Alors qu’il s’apprêtait à ouvrir une porte de la galerie qui menait sur la terrasse du Palais, Zéline le retint par la manche d’un geste ferme.
- Non ! N’y va pas, ça va encore te retomber dessus et tu passeras encore pour un idiot à ses yeux et à ceux de tous.
- Ce ne sont pas tes affaires, petite, répondit-il en dégageant brusquement son bras. Je sais me débrouiller seul, comme je l’ai toujours fait. Toi tu as tout son soutien, tu es sa petite fille chérie.
A ces mots il cracha par terre de dégoût. Zéline pâlit et baissa la tête. Ce n’était pas vrai. Elle aussi souffrait du comportement de sa mère, mais jamais elle n’oserait l’avouer à Zolzite. Ce n’est pas lui qui l’aiderait. Et puis, après tout, son sort était plus enviable que le sien.
Elle prit une profonde inspiration et releva la tête. Zolzite venait de pénétrer sur la terrasse, ses cheveux brillaient au soleil, la légère brise les fit onduler et une image se superposa à celle de son frère.
- NON !!! Attends !!! Cria-t’elle en tirant son frère en arrière. Pense à « Elle » !! Va la voir d’abord !! « Elle » t’aidera plus que Mère !! J’en suis sûre. Et puis si ça se trouve elle doit attendre ton retour avec impatience. Va la voir !!
- Quoi ?? Zolzite se laissa tirer en arrière, se retrouvant dans la galerie. Mais …
- Je demanderais une audience pour toi !! Je t’aiderai !!
Zolzite venait de comprendre ce que sa sœur lui proposait. Comment se faisait-il qu’il n’y avait pas pensé avant ? Pourquoi n’avait-il pas pensé à cette personne ? Celle qui comptait le plus pour lui avec sa fille.
Il se tourna vers Zéline :
- Pourquoi ferais tu ça ?? Tu n’as rien à y gagner !!
La jeune fille lâcha son frère et commença à se tordre les mains.
- Eh bien … je …
- Peu importe. Je n’ai pas besoin de toi ni d’audience. J’irais directement la voir dans ses appartements.
- Mais comment feras-tu pour y aller ??? « Elle » est une des personnes les mieux protéger de l’Autre Monde !! demanda Zéline, trouvant l’intention de son frère totalement suicidaire.
Ce dernier avait tourné les talons et s’éloignait d’elle vers les profondeurs du Palais Obscur.
Il ne se retourna pas. Ne lui accorda aucun geste. Aucun regard. Comme si elle n’avait pas posé de question.
Bientôt il disparut de son champ de vision.

Elle était contente malgré tout d’avoir pu parler à un membre de sa famille autre que sa mère.
Perdue dans ses pensées, Zéline n’entendit pas arriver une des suivantes de sa mère. Cette dernière toussota plusieurs fois pour lui indiquer sa présence, mais la jeune fille au regard de rapace ne bougea pas. La suivante posa timidement une main sur l’épaule de Zéline. Elle l’avait à peine touchait qu’elle se retrouva projeter sur un mur, hurlant de douleur.
La fille de la Dame d’honneur se tourna vers elle, furieuse.
- Qui t’as permise de me toucher, vermine !?
La suivante ne répondit pas, elle hurlait toujours. Des larmes coulant de ses yeux, les traits de son visage déformait par la terreur.
- GARDE !! cria Zéline, aussitôt trois garde en livré apparurent à côté d’elle. Emmenez-la, là où vous savez, leur ordonna-t-elle avec un sourire carnassier.
- Bien Mademoiselle, répondirent –ils d’une même voix.
Deux d’entre eux attrapèrent la suivante par un bras et la traînèrent vers sa dernière demeure. Le dernier garde tapa dans ses mains pour nettoyer les débris de la statue démolie par Zolzite quelques minutes plus tôt, puis disparut.
Une fois seule, Zéline vérifia qu’elle était présentable, fit apparaître une expression neutre sur son visage et sortie sur la terrasse en marmonnant :
- Je n’ai pas besoin que l’on vienne me rappeler que ma mère veut que je la rejoigne, je dois toujours être avec elle, je suis sa prisonnière et cela ne changera jamais