dimanche 13 juin 2010

Chapitre 6

« Je tourne en rond dans cette antichambre depuis deux heures. Et on m’a assuré que j’avais droit à un traitement de faveur. »

De rage, je donne un coup de pied dans la statue grecque La représentant. Puis me dirige vers la fenêtre. Dehors, ma mère, avec sa cours de pimbêches, fait une partie de croquet. Quelle mascarade ! Il fait beau. Cela me rappelle cette journée fatidique où j’ai tout perdu.

***

« Je suis la personne la plus heureuse que le Monde est porté. Je suis un homme comblé. Tout va bien. Je n’ai besoin de rien. J’ai tout ce que je désir.

Oh ! Bien sûr il y a quelques ombres au magnifique tableau de ma vie, mais qu’importe.

Rien, et je dis bien: rien, ne pourra entacher mon bonheur ! »

- Monsieur, il y a quelqu’un qui souhaiterait vous voir.

Je sursautai, et posai mes pieds sur le sol pour stopper le tournoiement de ma chaise de bureau. Cette voix allant dans les aigües, venait de me tirer subitement de mon état de béatitude.

- Quoi ?! Répondis-je un peu brutalement.

- Euh … il y a une personne qui vous attend au salon.

Je me mis à examiner la personne se trouvant en face de moi : petite, une expression inquiète sur le visage, des yeux bruns regardant dans tous les sens, les oreilles baissées, le costume porté le plus strictement possible, Figaro, mon fidèle assistant paraissait on ne peut plus embarrassé.

- Allons, allons, Fig’, tu veux me présenter une « petite amie » ? Non parce que c’est assez rare de te voir dans cet état, plaisantais-je en m’étirant et en posant mes pieds sur mon bureau en bois massif.

Le renard ne rit pas et sembla outré par ma remarque.

- Monsieur, non ! Il s’agit de quelque chose qui … euh, vous concerne … enfin je veux dire … le tra … votre travail, bégaya-t-il en se tordant les pattes.

- Mais enfin, crache le morceau ! Dis-moi tout ! Lui dis-je en replaçant une mèche de cheveux qui me chatouillait le nez.

- Non … il vaut mieux que Monsieur vienne voir cette personne lui-même.

Figaro sortit un mouchoir blanc de sa poche de veste et s’épongea le front. Cette réflexion me surpris, je posai mes pieds sur le sol et fixa mon acolyte.

- Figaro !! Dis-moi tout, tu me fais peur !! Ordonnai-je gagné par l’inquiétude.

- Eh bien … c’est à propos d’un … euh … effet secondaire de votre travail, avoua-t’il en reculant de quelques pas vers la porte de mon bureau, d’un air peureux.

J’éclatai de rire. Un « effet secondaire » ? N’importe quoi ! Mon travail n’en a pas et n’en aura jamais. Ce n’est pas comme si je jouai avec le feu si je puis dire.

- Ce n’est que ça, fait patienter cette personne, j’arrive.

Le renard hocha la tête et sorti rapidement de la pièce. Il devait s’agir d’une blague. Mais alors une très bonne, pour que Figaro se laisse si facilement berner, ce qui n’était pas une mince affaire.

Je soupirai et me levai pour me diriger vers un grand miroir à pieds près de la haute fenêtre qui éclairait la pièce toute entière. Je me nouai les cheveux avec un ruban de velours noir, boutonna ma chemise et mis un gilet brun par-dessus celle-ci. Levant mon regard vers mon reflet, je m’efforçai d’adopter une expression des plus sérieuse et impassible, dans l’intention de piéger mon futur interlocuteur. Puis je quittai la pièce pour me diriger vers le salon.

Après avoir pris une grande inspiration, je poussai les portes en bois sombre, massives qui donnait sur cette vaste pièce où j’avais pris l’habitude d’accueillir mes visiteurs.

A ce moment précis, rien ne me laissait présager que cette rencontre annonçait la fin de cette époque si heureuse. Que ma femme allait disparaître, que ma fille et moi serions contraints de fuir ce monde.

Qu’Elle me tournerait le dos.

Je rouvris les yeux, pour découvrir mon salon : face à moi deux canapés se faisant face à face, entre eux une table basse sur laquelle était posé un plateau, une théière et trois tasses de thé. Figaro s’était levé si subitement du canapé qu’il s’était cogné le genou sur le rebord de la table basse, mais ce n’était pas l’odeur de la boisson chaude qui me chatouillait les narines. Il sifflait de douleur tout en massant son genou. Sur le canapé d’en face, il n’y avait personne. Mais où était donc mon interlocuteur ?

Après avoir jeté un regard agacé au renard, ce dernier me désigna du museau une des fenêtres du salon qui donnait sur le jardin.

Je tournais la tête dans cette direction et découvrit un jeune garçon de dix ans, habillé d’un simple pantalon brun et d’un t-shirt blanc avec un transfert de super héros sur la poitrine.

Zolzite jeta un regard d’incompréhension à son assistant qui haussa les épaules. Le maître des lieux soupira et se dirigea vers le jeune garçon.

- Bonjour mon garçon, je suis Zolzite, l’hôte de ces lieux.

Le garçonnet sursauta et se tourna vers-moi et je pu découvrir son visage : de fine lèvre rose, un petit nez en trompette, des yeux gris-vert, de longs cil et des cheveux brun qui lui tombaient dans les yeux.

- Bonjour Monsieur, répondit-il timidement, je m’appelle William.

- Et bien William, que dirais-tu de prendre le thé avec moi ? proposais-je..

Le garçon acquiesça. Je posai une main sur son épaule et l’invita à venir s’assoir. Une fois installé face à face, Figaro s’empressa de servir la boisson chaude. Je lui donnais un coup de coude discret, il claqua des doigts et un plateau garni de pâtisserie apparut sur la table. William sursauta et à la vue des gâteaux ses yeux s’illuminèrent. Il leva les yeux vers moi dans une demande silencieuse. Je lui souris et l’invita à se servir. Après en avoir englouti deux je me demandais :

- Alors William, puis-je connaître la raison de votre visite ?

Le jeune garçon se redressa et adopta un air sérieux.

- Je suis venu ici parce que vous êtes mon père et qu’on m’a dit de venir vivre chez vous.

A cette réponse, le thé que j’étais en train de boire se trompa de chemin et je m’étouffais. Comment ça ? J’étais son père !! Et puis ce garçon puait l’être humain. Je suis un démon et je ne suis jamais sorti avec une humaine, elles sont bien trop fragile.

- Il doit y avoir une erreur mon garçon, je ne peux pas être ton père. Tu es humain et je ne me suis jamais acoquiné avec des … humaines, répondis-je en m’essuyant les lèves avec une serviette que Figaro m’avait tendue.

- Acoqu … commença à dire William qui était dans l’incompréhension la plus totale.

- Monsieur, si je puis me permettre, vous … euh … avez eu des relations avec des humaines et … commença timidement Figaro en fixant la théière.

- Développe Figaro. JE te signale que je sais mieux que toi ce que je fais de mon corps, lui répondis-je froidement.

- Je n’en doute point, Monsieur, mais souvenez-vous que je vous ai dit que cela concerné … le travail.

Le travail … le tra … Mais bien sûr ! Comment est-ce que j’avais pu oublier cela. Depuis douze ans j’avais rajouté une close au contrat que je soumettais aux humains. Une close de service après-vente. S’ils ne sont pas satisfaits, je prends l’objet du contrat.

- Ah oui … je viens de me souvenir. Mais je ne suis pas ton « père » … a proprement parler. Disons que j’ai aidé tes parents à t’avoir, expliquais-je maladroitement.

William me regarda d’un air interrogateur. Je lui souris et lui proposai une nouvelle pâtisserie, ce qu’il ne refusa pas.

- Figaro, dis-je en me tournant vers mon assistant, peux-tu aller me chercher le double du contrat concernant notre jeune ami ?

Le renard se leva, s’inclina légèrement et se précipita vers les portes du salon pour aller chercher les papiers.

En attendant, je me levai et me dirigeai vers une des fenêtres du salon qui donnaient sur le jardin. Au loin je pouvais apercevoir ma femme et ma fille, installées sous un saule pleureur, à côté du lac, en train de profiter de cette belle après-midi d’été. Comment allais-je faire maintenant ?

Figaro entra timidement dans la pièce, le document à la main. Je me détournai de mon bonheur pour me diriger vers mon assistant. Je pris le document et le lus.

Effectivement, selon la clause de « service après vente » je devais reprendre William s’il ne répondait pas aux attentes de ses parents.

J’étais anéanti. Je me laissai tomber sur le canapé. Je déboutonnai le haut de ma chemise sous les regards surpris des deux autres. Figaro s’approcha, jamais je n’avais ressenti un tel désespoir. C’était fini. Je devais me rendre à l’évidence. J’avais tout fait pour que cette close ne soit pas en gros caractère sur les contrats, mais apparemment les parents de l’enfant l’avait examiné au microscope. Le renard posa une de ses pattes sur mon épaule.

- Y a-t-il quelque chose que je puisse faire Monsieur ? demanda t’il.

- Non Figaro, je suis désolé, mais cette fois-ci tu ne peux rien faire. Ils ne vont pas tarder à …

Je fus interrompu par la sonnette de la porte d’entré qui retentit telle le gong de la fin du monde dans ma tête.

J’ordonnai à Figaro d’aller ouvrir la porte, me levai et me tournai vers William.

- Cela ne va pas être très agréable pour toi mon garçon, mais sache que je ne vais pas te laisser tomber. Je resterai avec toi.

Le garçonnet dégluti et hocha de la tête, puis il se leva. Il était aussi pâle que les draps du lit de ma fille.

Figaro refit son apparition dans le salon.

- Monsieur le Comité de …

- … de Régulation des Enfants Conçus avec des Humains, oui- oui, bla-bla-bla .

Un petit homme apparut, habillé d’un costume noir, le crâne légèrement dégarnit, le nez crochu, les lèvres pincées et un pince-nez en guise de lunette. Il portait sous le bras un rouleau de parchemin miteux. Il n’était pas seul, derrière lui quatre autres nains, habillés d’un costume gris et tirant une remorque, entrèrent dans mon salon. Les commis déchargèrent une énorme balance en or. Alors qu’ils se mettaient à installer les coupelles pour la pesée, le nain en costume noir s’adressa.

- Bien le bonjour, Ô Monsieur Zolzite. Nous sommes désolés de vous déranger mais comme vous le savez : la loi c’est la loi. Nous allons devoir établir l’endroit où va devoir être élevé le dénommé : William Pieutre.

Le nain dégarnit parlait très vite et le petit William regardait s’affairer les nains habillés de gris et n’écoutaient pas ce que leur chef disais.

- Eh bien … allez-y faite votre travail, dis-je.

De toute façon je n’avais pas à intervenir. La loi c’est la loi, comme il avait dit …et la R.E.C.H. est un organisme très stricte, il n’autorise aucune opposition.

- Bien-bien. Poussez-vous, dis le nain pressé à ses commis d’un ton brut. Il jeta un rapide coup d’œil à la balance et se tourna vers William.

- L’Humains doit aller s’installer dans une des coupelles pour que l’on puisse déterminer le pourcentage de démonie qu’il possède en lui.

William me jeta un regard inquiet. Je lui souris et lui conseilla d’obéir. C’est donc tout tremblant qu’il alla s’assoir dans la coupelle de droite. Là, l’autre coupole, vide, tomba subitement vers le sol.

Je devins blême.

- L’Humain William Pieutre, degré de démonie : 16.39 %. Monsieur Zolzite je vais envoyer ce résultat au bureau central. Il vous enverra votre avis d’expulsion vers le Monde des Humains dans la journée. L’avis aura un effet immédiat bien sûr, annonça le plus mécaniquement qu’il puisse le nabot chauve.

Ce n’était pas ma journée.

Les nains partirent aussi vite qu’ils étaient arrivés. Figaro était tombé à genou et sanglotait.

Je devais … quitter ma maison.

Quitter mon Monde.

Quitter ma famille.

Tout quitter.

Personne ne m’a aidé.

Personne n’a était compatissant avec moi.

Ma mère s’est bien moquée de moi. Je crois que c’était le plus beau jour de sa vie.

Et Elle. Ah Elle !

Elle m’a regardé de son air impassible. « La loi c’est la loi » qu’Elle a dit.

Puis ma femme, à l’annonce de l’expulsion est partie en grand fracas.

Me laissant seul avec ma fille et William.

Ma petite fille adorée. Il n’y qu’elle qui n’a jamais cessé de me sourire.

Figaro a été muté.

Pendant dix longues années, j’ai du « survivre » dans le Monde des Humains. M’adapter.

Aujourd’hui je reviens.

Et ma mère n’aura pas le dernier mot sur ma vie comme elle a cru l’avoir en apprenant mon retour.

Je ne vais pas me laisser faire.

Je dois acquérir Son soutien.

jeudi 10 juin 2010

Lukas March: Introduction

Mon nom est Lukas March, j’ai 35 ans, je suis célibataire et je vis dans une grande maison non loin d’une grande ville. Je suis actuellement sans emploi.

Voici la manière dont je me présente la plupart du temps. Parce que je cherche du travail (même si je n’en ai pas vraiment besoin vu le solde de mon compte bancaire), un homme (et pas une aventure d’un soir), des amis aussi (parce que l’argent ne fait pas le bonheur).

Mes journées je les passe à lire des romans à l’eau de rose et à regarder la télé. J’ai des centaines de chaînes. J’ai une pièce remplie de livres et une autre de DVD. Un ordinateur dernier cri, toutes les consoles de jeux 3ème génération, une salle de sport « flambant neuf » ; une piscine, … Que demande le peuple !!!! DE LA COMPAGNIE !!!

Mais j’ai peur des gens.

Pas depuis longtemps.

En réalité, ce n’est pas eux qui me font peur, mais moi.

Car depuis quelques mois, je ne suis plus la même. J’ai changé de tout au tout : physiquement, mentalement et socialement.

Comment ??

Non, je ne suis pas encore prête à vous le raconter.

Il est tard.

Il faut que je ferme les volets, les persiennes, les grilles, les portes, décroche le téléphone qui ne sonne plus.

Je dois au plus vite aller me coucher. Rejoindre le monde des rêves. Là où tout va bien. Là où tout est comme avant.

Je remplis un verre d’eau dans la cuisine, sors un pilulier d’un des tiroirs, prends une pilule orange, l’avale.

Je rejoins ma chambre à coucher, je m’allonge dans le lit, tire les couvertures, les lisses nerveusement, et attends les yeux grands ouvert que le cachet face son effet.

Vite, vite !!! Le soleil se lève !!!